L'Ordre des Flammes
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L'Arrivée : Partie 2

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Message par Etherna Thus-tal-Al'Shar Jeu 23 Juil - 22:34

HÉRITIÈRE : UNE FIN



"Les terres et les anciens royaumes étaient désormais confondus dans le paysage. Les frontières n'existaient plus depuis que cette ère macabre s'était installée. Des races entières avait d'abord contracté des affections. Quelques ont réussi à survivre au prix de mutations catastrophiques. Leur durée de vie en avait largement pâti. Beaucoup s'étaient éteintes pour n'être qu'un vague souvenir dans le conscient de certains érudits qui s'évertuaient, encore, à garder des traces d'un passé qu'eux-mêmes n'avaient jamais connu.

La lignée des Cameron avait débuté bien avant que les choses ne tournent au désastre, avec ces épisodes maladifs et tortueux comme on les connait désormais. Du temps où les races alliées luttaient contre l'une des uniques menaces et persistantes : Les démons.

Ils avaient réussi à se faire de l'argent en exploitant le marché inter-monde qui connectait la Terre et la Terra. Avec le réseau de "voyageurs-passeurs" qu'ils avaient formé, ils faisaient passer des cargaisons importées directement de France ou encore des États-Unis, avec plus ou moins de facilité. Quand une partie du réseau se prenait des contrôles sur les marchandises illégales, elle mourrait contre la justice, sans avoir une quelconque aide. Le silence se voulait de rigueur. C'était le tribut ingrat à payer pour être au service des Cameron et intégrer l'organisation.

De quelques introductions hasardeuses, ils avaient réussi à former un empire du commerce clandestin et du trafic d'armes, au fil des années. Les sièges étaient disséminés dans les plus grandes villes, dans les parties inaccessibles ou très malfamées. Ainsi devinrent-ils des sortes de barons.

En ces années troubles, ne persistait plus qu'une famille de cette lignée. A détenir dans les derniers biens provenant de Terre, ils avaient réussi à subsister grâce à l'économie qu'ils avaient développé et l'usage de la force grâce aux armes. Des contrebandiers, qui avaient élu domicile dans les ruines d'un lointain royaume elfique. Les trois quarts de la forteresse avait été détruit. Le nom sylvain et premier du lieu trouvait ses abîmes depuis trop longtemps pour que quelqu'un s'en souvienne, si ce n'est un livre. Alors, de cette tour en le plein milieu, craquelée et effritée en son sommet, de ses pavés grisonnants et lugubres, les épaves de cette bastille donnait désormais sur le semi-hameau fortifié que l'on nommait FroideTour.

Si les Cameron étaient encore craints pour simple fait qu'ils détenaient un semblant de "technologie", les habitants qui s'étaient ameutés autour de la famille n'avait pas tardé à les élire à la tête du village pour les régir. Ainsi avaient-ils protection et pouvaient-ils jouir de quelques payements que savait encore s'accorder cette partie de la Terra, contre des travaux. Travaux qui commençaient, dans l'époque actuelle, à peser sur les corps et les esprits cause de la crise ambiante.

Une milice très restreintes sur bases troubles de chevalerie s'occupait des ténèbres qui s'éveillaient la nuit aux alentours des remparts, sans pour autant s'y enfoncer : Ils surveillaient. Du reste, elle calmait les débordements des habitants. De ceux qui voulaient se rebeller contre le Marquis. De ceux qui perdaient la raison en sentant approcher le mal ou même de ce qu'ils entendaient.

Une quiétude toute relative..."





Jour 0
Localisation : FroideTour




La fillette déambulait dans le grand couloir de l'hôtel principal, au quatrième étage. La pluie fine et le ciel grondant du jour n'empêchaient en rien les diverses pièces d'être animées d'une certaine forme de vitalité. Cela était procuré par l'espace : Grand. Le plafond devait mesurer quelques trois mètres. Les lustres chatoyaient de la lueur des douzaines de bougies qu'ils comptaient chacun. Cette luminosité se voyait amplifiée du mobilier somptueux et dorés mais aussi des divers miroirs de tailles incommensurables. Tout était à la démesure. Même s'il ne restait rien d'un quelconque legs elfiques - si ça n'est le lieu lui-même - la décoration avait ce lourd penchant que l'on qualifierait de victorien, sans le côté sombre qu'on peut parfois lui connaître.

De grands yeux noirs, ronds, parés à contempler le monde dans lequel elle vivait. Des lèvres toujours ornés d'un sourire franc et large que l'on connait aux enfants. Son visage était d'un pâle qui n'avait rien à envier aux réelles coutumes nobles. Et pour cause, elle était bien mieux à l'intérieur du donjon principal qu'en extérieur. Elle affectionnait pourtant beaucoup ses quelques sorties dans la cours principale. De voir le monde et les gens s'activer. Les odeurs de la forge et des écuries ne l'avaient jamais vraiment dérangé. Mais c'était comme ça. Une des règles à respecter : Ne sortir qu'en la présence de ses parents.

Ses longs cheveux blonds voletaient dans sa semi-course. Au delà de ces portes, elle allait retrouver son père, dans son bureau. Elle n'avait pas souvent l'occasion d'y aller en la pleine journée, pour cause de son travail et toute l'administration qu'il devait gérer. Parfois faisait-il lui-même les réunions militaire pour planifier les opérations de sa vingtaine de miliciens. D'ailleurs, elles aimaient bien les croiser aussi.  Rhaumm était souvent assigné à la surveillance de la jeune fille quand ses parents ne pouvaient s'en occuper.

Dans sa longue robe bleue et aux dentelles blanches, cette dernière n'avait pas même prêté attention à l'agitation qui se déroulait par delà les fenêtres. Des voix rauques. Des disputes certainement, mais cela était chose commune.

Alors de toute sa force et à donner davantage de son poids en se plaquant contre l'immense porte, elle entrouvrit pour énoncer un :

-Papa !plein de vie.

Ce dernier, était partiellement caché par l'un des miliciens qui se trouvait à ses côtés. Les deux semblaient converser à voix basse, de manière grave, en observant le contre-bas : La cour. Le soldat en armure de plaque - pareil à un chevalier - tourna la tête sèchement pour dévisager la jeune fille avec surprise :

- Mademoiselle ?! Que faites-vous ici ?

Reginald Cameron possédait des cheveux en brosse d'un noir profond. Une moustache bien travaillée en guidon pour des yeux d'une noirceur tout aussi prononcée. Même si sa redingote n'était pas parfaite avec quelques trous et des signes de vétusté ici ou là - bien qu'une belle montre à gousset cachée - ce dernier laissait transpirer de façon inconsciente tout le charisme dont il savait faire preuve.

- Paige ? Ma Chérie ? Questionna ce dernier.

La jeune fille sourit largement pour hocher la tête plusieurs fois : Oui, c'était-elle !

- Tu n'es pas avec ta mère ? Vous deviez rester ensemble dans les combles. Le Marquis consulta son dévoué d'un regard dur, comme s'il y avait manquement condamnable.

- J'avais bien transmis à Ma Dame la situation et vos directives, Monsieur. S'excusa-t-il avant d'intimer à la jeune fille d'avancer au plus vite vers eux. Son index gauche aura désigné, par la suite, d'être proche de son père.

- Non, j'étais partie dans les cuisines pour prendre un fruit. J'ai parlé avec Mathilda et on fera le ragoût du soir ensemble !

Elle n'était pas peu fière d'aider la vieille cuisinière avec qui elle avait tissé une grande complicité. Son caractère facile et docile lui permettait de gagner vite l'amitié des adultes.

Mais à les voir dans cette situation, elle pencha la tête un instant, en se collant, dans une étreinte au ventre de son père.

- Il y a un problème, Papa ?

Reginald inspira en déposant une main chaleureuse sur les cheveux de sa fille avant qu'elle ne ferme les yeux.

- Faites comme vous pouvez. Souffla-t-il au soldat. L'intonation dénotait de l'inquiétude et une fatalité à laquelle il fallait se résigner.

- Bien Monsieur. Ne bougez pas surtout, nous nous occupons de ça.

Le milicien opina pour partir au trot d'où était venu la blondinette.

- Non, tout va bien Paige. Tout va bien. Puis dans un quelconque soucis, Tu n'as pas vu ta mère, ce matin ?

- Si pour le lever. Lui signifia cette dernière, d'une petite voix, calme.

Elle n'avait qu'une dizaine d'années et pourtant déjà son empathie lui faisait ressentir bien des situations. Elle n'arrivait pas à appréhender celle qu'on lui présentait ici, mais quelque chose de bizarre tournait dans son ventre. Comme de ces rares fois où elle savait ses parents à se disputer avec violence.

- Bien, accueillit-il de nouveau cela sans qu'il ne s'en réjouisse pour autant. Quand Sean reviendra, il te conduira à ta mère.

Elle releva le nez sur son père. Sa voix se fit grave à son tour avec peut-être une quelconque note de tristesse.

- Tu veux qu'on aille dans les combles, alors ?

Monsieur Cameron caressa le visage de sa fille du bout de son pouce, tout en l'observant.

- C'est pour ton bien, ma Chérie. L'histoire d'une heure, tout au plus.

Elle plissa les yeux, comme pour percer au plus profond ce à quoi il pouvait bien penser.

- On doit... se cacher. N'est-ce pas ?

- Je ne v-




Il n'eut pas terminé sa phrase que des cris de panique retentirent comme jamais.

Trois étages les séparaient du rez-de-chaussée et pourtant le son avait filé à une vitesse folle. Les voix de quelques servants éclatèrent en des onomatopées stridentes avant de trouver fin brutalement. Des beuglements de férocité semblaient démontrer d'un quelconque acharnement. Des insultes parfois se faisaient entendre.

Le cœur de la fillette commença de battre à une vitesse folle. Son sang venait de taper, singulièrement, dans les yeux, à même de ressentir le pouls. Une grande traînée glacée déchira sa colonne vertébrale pour la paralyser un instant, le souffle coupé : La peur. Ses mains relâchèrent la prise contre son père et pourtant se crispèrent dans le vide ensuite.

- Paige, sous le bureau. Vite !

Elle regarda son père, sans le voir... Il n'était qu'une image ancrée dans ce décor.

Le centre de son attention plus loin. Plus bas.

Elle devait s'imaginer ce qu'il se passait. Elle devait comprendre... sans pour autant y parvenir.

- Paige ! File sous le bureau ! Secoua-t-il cette dernière en lui désignant l'imposant meuble duquel il rédigeait ses documents. La salle était assez imposante dans son espace. Une table basse, ronde, en épicentre de quatre fauteuils moelleux.

La jeune fille hocha dans le vide pour se précipiter vers le bureau. Elle s'étala dessus, premièrement, comme si elle avait trébucher, pour ensuite se mettre à quatre pattes et ramper dessous. Avant de finalement rentrer la tête, elle observa son père, la bouche entrouverte, sous le choc encore.

- Reste en dessous ! Je veux pas te voir ! Je veux pas t'entendre Paige ! Pour l'amour du ciel, tu ne bouges pas tant que je ne viens pas ou quelqu'un de la milice. Compris ?

Un haut-le-cœur lui retourna l'estomac tout en lui faisant remonter des larmes qui ne couleraient jamais.

Elle recula au plus profond du bureau pour se coller contre le bois. Ses mains vinrent se lier en englobant ses genoux. Son regard était perturbé de la suite des événements.

Pourquoi devait-elle être avec sa mère Rosa ? Où était sa mère ? Pourquoi devaient-elles se cacher dans les combles, si peu accueillantes, si noires et avec toutes ces toiles d'araignées !? Pourquoi les servants du donjon avait crié comme jamais ils n'avaient crié ? Pourquoi des bêtes féroces se déchiraient la voix en insultant ?

Trop de questions dont elle n'avait pas les réponses...

Quelques minutes passèrent seulement et pourtant toute une éternité s'écoula pour les deux. Le Marquis vint se saisir d'un des nombreux revolvers qui ornait le mur de cette immense pièce. Il passa devant Paige, acculée, pour ouvrir un tiroir et sortir un paquet de munitions. Quelques tombèrent sous ses gestes précipités. Puis finalement le carton de balles. A grands pas il vint fermer la porte, et à clé.

De la sueur commençait de perler sur le front du Marquis et ses gestes trahissaient désormais une grande nervosité - qui transparaissait pourtant légère - . De quoi ne pas lui permettre d'insérer les balles sans buter contre le barillet au moins une fois avant la réussite.

Chargeur au complet.

Il prit place à l'exact opposée de l'entrée, chien de l'arme reculé. Il se voulait droit, le revolver dans sa main, elle-même le long de son corps. Sa main gauche articulait ses doigts entre eux qui devenaient poisseux. Ses paupières tressaillaient de temps à autre, il luttait lui aussi contre ses pensées. Pensées qui pourraient le captiver dans un instant fatal. De cette demi-seconde où l'on pense, alors que le monde s'agite de trop. De cette demi-seconde où le chat, devant le trou de la souris, ne doit pas se perdre dans son hyper-concentration et louper sa proie.



- VOUS POURREZ PAS NOUS EMPÊCHER, BANDE DE VENDUS !

...

- VOUS ALLEZ CREVER !

...

- DÉFENDEZ L'AILE, DÉFENDEZ L'AILE !

...

- TA GUEULE !

Des mots. Des phrases.

Beaucoup.

Des intonations.

Beaucoup.

Des attaquants contre des défenseurs.

Un amas.

Un amas brutal et certainement sanglant.

Et le pire dans cela : L'intensité, grandissante, comme la cavalerie à arriver aux proches lignes de l'ennemi.

Puis le couloir pour monter au troisième étage :

- ON RECULE ! ON RECULE ! ON PREND L'AVANTAGE DES MARCHES !

Une stratégie nébuleuse...

- CREVEZ-LES !

Et bien d'autres concernant l'opposition...


- OK LES GARS, EN FORMATION ET ESPACEMENT DANS LE COULOIR. LOYLD DEVANT ! JAMES TROIS QUARTS ! LES LAISSEZ PAS PASSER AU PRIX DE VOS VIES MESSIEURS !

Le Marquis desserra son col, de sa senestre, avec grossièreté, pour faire rompre quelques coutures. Il soupesa son arme et s'assura une énième fois que le chien était retranché au maximum pour ouvrir le feu s'il le fallait.

Son regard au sol, nerveux puis sur la porte : Prêt.

Les bruits du fer, entrechoqué. Des râles. De l'agonie. Des "NON !". Des minutes. Des directives infructueuses ou presque. Puis le silence...

Un long silence pour l'étage. Une partie de l'offensive était montée...

La fillette leva le regard, sous son bureau, pour prêter davantage d'attention avec ses oreilles. La fin allait être sonnée ?




L'épaisseur de la porte se fit transpercer par une épée sanglante, d'estoc. Un râle de douleur : On venait d'empaler quelqu'un.

La clenche à bouger une fois.

Deux

Trois.

Cinq, de façon frénétique...

Un coup de pied contre la porte. Trop solide...

Encore la clenche, accompagnée de jurons.



Puis la voici à sauter.

Le Marquis observa la chute de la poignée. Elle vint se fracasser au sol dans un bruit cristallin.

Un premier homme entra :

- Te voila, pourrit-

Des tirs.

Reginald venait de percer par deux fois le torse d'un des habitants munis d'une épée. Un second pointa son arbalète sur lui mais il était déjà trop tard. Le carreau avait déjà transpercé sa cage thoracique.

C'était l'un des ouvriers qui travaillait dans la proche mine. Sa tête était sale. Il apposa une main sur son camarade qui s'affaissait pour cause des tirs, comme à ne presque pas en revenir :

- On l'a eu.

Son sourire se fit plus grand, émerveillé, comme s'il renaissait enfin.

- On t'a eu "Monsieur le Marquis" ! entonna-t-il devant son employeur, laissant sévèrement tomber son voisin qui ne se réjouirait plus jamais. C'est fini maintenant. Tu vas passer l'arme à gauche.

Il se délesta de son arbalète, sans ménagement, pour empoigner un grand couteau à sa ceinture, de son étui.

Reginald s'écroula, une main à tenir le carreau planté. Tout en reculant, sa dextre faisait un signe négatif vers son oppresseur, comme si ça n'était pas possible. Comme s'il devait attendre. Son attitude était figée, souffrante. A peine osait-il respirer.

L'arbalétrier improvisé s'assit sur ce dernier, pour se délecter de sa réaction, la lame approchant avec dangerosité et de façon irrémédiable. Alors qu'il allait pénétrer l'épiderme et mettre un terme à tout ça, une nouvelle giclée de sang dans un bruit prompt partit sur le sol, et une autre moitié sur les longs rideaux...

La fillette tremblait alors qu'elle se tenait à quelques mètres.

L'arme de poing glissa de ses mains pour tomber au sol. Elle avait pris le revolver chargé, dans le tiroir. Héritière de tout ce que les Cameron avaient fait au fil des ans, on lui avait déjà montré les objets de leur réussite. Ils étaient des denrées rares. Elle n'avait jamais tiré quand il était chargé, cependant. Et si en d'autres occasions elle aurait réussi à prendre peur de son acte, sa seule inquiétude était de voir son père commencer de partir dans une mare de sang.

La jeune fille s'approcha lentement dans quelques "Papa" inaudibles. Son père essayait aussi de lui parler, mais rien. Elle n'entendait que sa respiration difficile, le poumon troué. Elle s'écroula, sans savoir trop quoi faire. Sans trop comprendre toute cette matinée tragique.

- Elle est là.

Sans pour autant l'entendre...

Puis un coup derrière la nuque et elle rejoignit à son tour le sol...






Une violente douleur vint à naître en son cou. Paige ouvrit les yeux, encore embrumée, la tête basse.

Une autre douleur lui tira un cri : On venait de joindre ses poignets, en son dos, avec beaucoup trop de force.

La pluie ruisselait sur son visage et ses cheveux l'empêchaient de tout percevoir. Sa respiration était finalement difficile puisqu'on la strangulait plus ou moins. Elle se sentait dans un équilibre précaire.

Son voisin de droite était Sean. Sans son casque, il était à la potence. Corde autour du cou, les pieds sur une chaise. Le sort de la fillette n'en était pas moins le même.

La place principale était boueuse. Des cadavres de quelques miliciens éparpillés ici ou là. Quelques opposants, eux-aussi, morts. La foule armée se voulait déchaînée. Et si le calme lui paraissait au début, la jeune fille n'eut pas long à entendre correctement l'ambiance au fil de l'éveil de ses sens.

- Le chien du Marquis ou sa fille ?!

Hurla comme un présentateur de foire le bourreau, pour son public.

Plusieurs réactions :

- Butez la jeune !

- Cassez les dents de ce sale con !

- Crevez-les !

- Faites-les souffrir !

Et d'autres choses encore...

Une fenêtre s'ouvrit alors, à quelques mètres, dans le bâtiment principal.

- Le Marquis et sa femme ! annonça un des rebelles en montrant tant bien que mal les deux morts. Un second se saisit de la main de Redingald pour le faire saluer.

La foule était partagée d'applaudir la non-vie des deux, et l'autre à huer le couple avec tout ce qu'il représentait.

- Et hop !

Les corps plongèrent pour arriver au contrebas dans des craquements sinistres.

Paige lorgna comme elle put, sans risquer de tomber, les mouvements de tête restreints. Quand elle vit Rosa désarticulée, elle hurla tout ce qu'elle pu "Maman !!!". Les larmes coulèrent, cette fois, de manière instantanée.

Le brouhaha continua.

Ça parlait.

Ça criait.

Ça chantait.

Quelques piétinaient les morts... D'autres s'essayaient au port des armures...

- Mes chers compagnons ! donna de la voix le "bourreau" pour canaliser davantage la foule. Voici votre moment tant attendu, la pendaison !

A l'unanimité des échos barbares d'approbations retentirent. Cette foule avait beau être misérable, rachitique, sale, elle faisait preuve d'une grande bestialité.

- Tu verras, c'est pas si terrible. Souffla en confidence l'exécuteur pour la fillette, avant de faire voler le tabouret qui lui servait de piedéstal, avec sa botte.


La fillette émit un "Ahhg !". Son cou venait de peser contre la corde de tout son poids. Elle commençait de gesticuler pour avoir pied : En vain.

Sean tenta de se retenir à deux mains contre le tressage, pour se soulager - les siennes nouées en avant -.

Une délectation malsaine et des encouragements fusèrent d'un peu partout avant qu'un nouveau trouble s'installe :

- LA PATROUILLE ! LA PATROUILLE !

Un groupe de sept cavaliers débarquèrent au grand galop, mené par un chevalier imposant dans son armure rutilante et argentée. Trois des miliciens montés vinrent percuter purement et violemment la foule avec tout le poids des montures. Quatre autres commençaient de rabattre quelques éparpillés, quand ils n'arrivaient pas à les pourfendre, de grands coups d'épée.

Le cheval du lourd combattant se fit prendre d'assaut par les habitants vindicatifs, transpercé ici et là. Le cavalier repoussa un premier villageois, d'un coup de botte dans les dents - ce qui lui en fit sauter quelques-unes au passage -.

Il descendit dans toute la lourdeur qui le caractérisait.

Un second essaya de le transpercer, d'un couteau de cuisine ,en estoc et dans le dos.

Sans succès.

Le combattant tourna la tête pour aviser de son assaillant ,et, de sa propre main, lui décrocha un revers monumental à le faire vriller sur lui-même et tomber. Extirpant sa claymore - non sans faire taper le bout du pommeau dans les dents, une nouvelle fois, d'une révoltée malhabile -, il vint terminer son premier réel agresseur à terre en lui plantant son épée dans le buste.

Un nouveau vint lui sauter au dos, comme pour l'enlacer et le faire tomber.

La centaine - bien dépassée - de kilos sans armure du milicien n'allait le faire défaillir devant si peu de poids. Un autre encore vint de face l'attaquer à l'épée, d'une coupe transversale. Le chevalier interrompit la frappe en se saisissant à plein gant de la lame.

- Tu vas crever... serra les dents l'agresseur en commençant de clairement questionner la bête.

A deux mains l'habitant tenait la poignée de son épée ,et, de tout son poids en arrière, il essayait de ne pas être tiré en avant par la poigne féroce du chevalier qui le ramenait à lui, doucement mais trop sûrement. Assez proche, le casque du soldat trouva le crâne du villageois dans un premier craquement. Le chevalier relâcha la lame de l'épée qu'on voulait lui envoyer, au départ, pour se saisir au cou de son agresseur. Un nouveau coup de casque sur le crâne. Puis un deuxième et un troisième. Du sang maculait le heaume du guerrier tandis qu'une partie de la foule commençait de tenir les distances avec lui.

Un des miliciens trouva la mort, pris entre les fourches et mis à mort par les arbalètes.

Le meneur des cavaliers s'empara de sa claymore pour observer les alentours, tout en se délestant de celui qu'il avait au dos. C'est à la vue - sur l’échafaud - des condamnés à suffoquer - et se débattre - qu'il commença de courir. Parfois il prit l'un des rebelles par le cou pour le projeter à des mètres hors de son chemin. Parfois il fracassa - de grands coups de coude - le nez de quelques autres. Enfin son poing armé matraqua, à diverses reprises, des bouches pour les alléger de dents. Cela faisait parties des zones que l'on enseignait pas spécialement à l'acharnement lors des combats, et pour lesquelles, pourtant, sa grande force leur donnaient beaucoup de fragilité.

A l'arrière de l'échafaud, il constata de la mort de Reginald et Rosa, fouillés par un grippe-sou. Le chevalier vint le prendre par le col et le soulever pour l'encastrer, face première, dans la façade. Une onomatopée de souffrance et de surprise en fut résultante. Il retourna le pillard pour lui asséner un coup de genou dans le ventre à lui en briser quelques côtes. Le souffle coupé ne l'aida pas davantage. Puis alors une droite releva sa tête courbée en avant, pour la faire taper avec brutalité contre la pierre - qui devint rougeoyante -, et son poing enfonça la mâchoire du voleur avec une facilité déconcertante. Le mort s'écroula au sol, pris d'encore quelques convulsions tandis que le géant termina de se hisser sur les planches. De sa dague à la ceinture, il découpa les liens dans le dos de la fillette, puis la prenant sous le bras, la corde à son cou.

- Ça va Paige ? S'inquiéta-t-il d'abord. Il retira son heaume souillé et légèrement déformé, pour le balancer au sol. L'homme avait une cinquantaine d'années. Une barbe liée à la moustache, blanchâtre d'un blond, lui mangeait le visage. Les cheveux mi-longs plaqués en arrière. Il intimait au naturel la sévérité, la rigueur, la discipline et la force.

La fillette reprit son air, un peu sonnée.

Le milicien sauva le deuxième condamné de son destin.

- Je vais faire évacuer la petite, regroupe-toi avec les autres Sean.

Il n'était pas tant subordonné - et même intermédiaire du Marquis avec les soldats parfois-, mais cette fois Sean opina en lorgnant une possible arme à prendre, de nouveau libre de ses mouvements.

Le guerrier descendit de l'estrade avec son colis vivant sous le bras. Il longea le mur du donjon et l'échafaud. Le pas pressé, il n'était pas de ceux qui jouait dans la discrétion, ni de ceux qui attaquaient en traître, mais il voulait garder intact la fillette qu'il portait.

Le duo pénétra les écuries, plus loin. Là, il déposa l’héritière dans la paille pour aller seller un cheval de l'équipement qui était proche.

- Tu prendras Obsidienne. Galope et pars loin. Ne reviens jamais en arrière. Dépasse les villages alentours. Tu t'arrêteras dans un hameau pour dormir.

Obsidienne était la monture du Marquis de FroideTour. D'un noir entier qui lui donnait son nom, l'étalon n'était pas souvent utilisé. Harnaché des vestiges d'une selle haute-plaine en cuir richement travaillée et estampillée d'un "Reinsman", une carabine était coincée dans son fourreau, lui-même passée entre le faux-quartier et le quartier de la selle, côté gauche. A droite, une rapière rangée dans son étui, elle aussi. Des sacoches de bonnes tailles surmontaient l'assise.

Le chevalier fit grimper la petite fille en la faisant s'asseoir, pour ensuite tirer les conductrices et la mener.

A peine venait-il de quitter le box de l'animal, pour rejoindre la sortie, qu'un carreau le transperça au poitrail. Le chevalier serra les dents en grognant.

- Tu pensais t'enfuir, ordure ?

Un autre gringalet armé de son arbalète souriait, fier de sa prise.

Le guerrier lâcha les rênes pour avancer vers le nouvel adversaire. Ce dernier recula doucement, en comparaison, tant il était attaché à chercher le carreau, dans son carquois de ceinture à l'arrière - Pas habitué, à le voir faire -. Le bougre sortit juste la munition quand la lourde dextre du chevalier s'empara de la sienne. Il lui retourna le poignet en une clé qui rompit au détriment de quelques jonctions cassées, et le carreau qu'il avait en main se retrouva bien trop vite à passer au bas de son menton pour remonter certainement, jusqu'au cerveau.

Le milicien cracha une gerbée de sang avant de faire valdinguer le tireur contre un pan des écuries. Il revint s'emparer d'Obsidienne pour le conduire en extérieur.

La cours était un champ de bataille désastreux. La rage animait autant les habitants qui s'étaient soulevés avec leur armes - bien souvent de fortune mais dangereuses - que les quelques derniers miliciens à mener la défense d'un fief sans son souverain.

Un dernier coup d’œil sur la fillette :

- Tu ne t'arrêtes jamais, Paige. Et tu te cramponnes, entendu ?

- Et toi Rhaumm ? Questionna-t-elle, alors que cette même frayeur revenait s'emparer d'elle, dans toute cette cacophonie.

- Ne t'en fais pas pour moi.

Le guerrier mit une tape coriace sur la croupe du cheval qui commença de partir au galop.

La jeune fille s'accrocha de tout ce qu'elle pu à la corne de la selle, les jambes serrées pour ne pas se faire éjecter de sa monture, durant la fulgurante avancée. Elle observa son dernier repère, rapetisser avec la distance...

Le chevalier, lui aussi focalisé sur le départ de l'héritière, se fit empaler par une épée venue du dos. Il émit un râle rauque en écartant les épaules. Ses deux mains s'apposèrent contre la lame, comme pour ne pas lui permettre d'avancer davantage.

- Rhaumm ! cria la jeune fille, de nouveau dans l'impossibilité de rien et surtout de tout.

Obsidienne traversa toute la cour, sans demander son reste. Le cheval esquiva le rassemblement.

- LA GAMINE, LA GAMINE ! Hurla un attentif, pour qui voulait bien l'entendre.

Les regards se tournèrent parfois.

Une vingtaine de mètres pour sortir de l'enceinte dans ce grand galop...

Des tireurs à s'orienter...

Quelques accoururent comme ils le pouvaient.

Une dizaine de mètres...

Puis deux carreaux, dans l'animal. Un dans l'encolure, l'autre vers la croupe.

Une serpe réussit à pourfendre une grande partie du flanc. Une fourche avait trouvé - de la pointe des dents - matière, elle aussi.

Mais encore une flèche...

La fillette venait de se faire transpercer aux côtes, à droite, tandis que l'animal essayait tant bien que mal de garder sa stabilité, manquant de s'écrouler, lors des assauts.

Obsidienne continua dans sa lancée, les éloignant pour de bon de ce fief devenu le siège soudains des enfers.




La petite fille gardait sa main tremblante contre le bois du projectile, l’œil à tourner. Sa senestre se crispait davantage à la crinière de sa monture. Elle s’affaissait tout contre...

Le sang continua de dessiner le cheminement des fuyards.

L’œil du cheval s'embruma à son tour, sans pour autant que la course ne perde de son intensité. La bouche de l'animal émettait quelques vibrations sonores, provoquées par l'air expulsé, entre ses dents et babines. Il courait de travers, dans ce petit chemin unique.

L'air se voulait cinglant, pour les deux blessés, et sous l'impulsion de cette vitesse. Les arbres défilaient à vive allure, sans qu'on ne puisse s'y attarder. La pluie fouettait autant le cuir que le visage.

Le temps n'était plus une notion sur laquelle se reposer. Parfois trop long, sur la vie à s'échapper. Parfois trop rapide, sous le tiraillement des douleurs...

Quelques minutes ?

Quelques heures ?

Une éternité ?

Parfois son corps en avant penchait dangereusement d'un côté de l'encolure, pour la mener à tomber. Dans les derniers moments, elle donnait de son peu de forces restantes pour se tenir et se replacer. Son teint n'était plus pâle mais livide. Le sang avait ruisselé sur tout son flanc droit et l’hémorragie en interne savait se déverser par les quelques interstices dessinés par le cheminement de la flèche, dans les tissus et les organes. Tout n'était qu'un amas de douleurs et les excès la menait à ne plus rien ressentir, paradoxalement. Le fer et l'hémoglobine lui restait en bouche, tant elle en bavait, en crachait, une fois penchée.

Obsidienne ralentit finalement pour passer du galop au trot. Son sabot manqua de s'encastrer dans l'une des flaques qui n'était autre qu'une crevasse vicieuse. L'étalon perdit l'équilibre pour presque s'affaler. Quelques mouvements musculaires en compensation pour garder l'équilibre, mais il était désormais au pas. Ses bras avant et ses jambes commençaient de ne plus supporter le poids de la fillette. Davantage moins le sien.

La blondinette bougeait doucement son index plaqué contre la crinière, comme pour caresser son destrier. Comme pour lui intimer que tout irait bien. Aussi, par là, souhaitait-elle se rassurer elle-même.

Sa vision devint alors trouble tandis que l'animal s'écroulait pour de bon au sol, sur ses genoux.




La jeune fille bascula, tête la première contre la terre, les cailloux et l'eau. Elle se crispa sous la douleur qui la lançait déjà, et l'impact de la chute. Sa force n'était plus pour se lever ou bouger.

La brume commençait de recouvrer les bois et l'un des lunes éclairait les épais nuages qui étaient ambiants pour la zone.

D'abord des pas.

Puis des grognements. Comme le loup enragé commencerait de prévenir la proie de sa future folie.

La chose se profila, dans cette pénombre, à ramper comme un animal sur ses mains et ses pieds. Ses yeux n'étaient animés que d'un blanc. Le visage était bariolé dans son entièreté d'une sorte de tatouages cabalistiques conséquents. Sa tenue n'était que des pans de plumes et de peau.

Puis le métal à briller...

Elle était reliée à une seconde entité, bien campée sur ses jambes quant à elle, par le biais d'un collier et d'une chaîne en fer.

L'humanoïde là dessous se terrait sous une capuche fournie en fourrure. Les pans de sa tenue étaient en peau diverses. L'éclat d'une lame de hachette, au flanc, brilla un instant, et le bruit de divers grigris suspendus aux vêtements accompagnaient l'arrivée macabre de ce duo.

Le cœur de la  jeune cavalière ralentit largement...

Ses yeux se clôturèrent lentement, tandis que ceux de sa monture étaient depuis quelques instants figés dans la mort...




Une chose était certaine. Les vivants ne déambulaient jamais seuls la nuit. Et ceux-ci n'étaient pas là par hasard...
Etherna Thus-tal-Al'Shar
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Date d'inscription : 04/04/2017

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